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  • Préemption : Absence de projet

    Réalité du projet. Exemples d’application

    La jurisprudence exige que les titulaires du droit de préemption urbain puissent justifier, à la date de la préemption, « de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date » (CE, 7 mars 2008, Commune de Meung-sur-Loire, req. n° 288371, publié au recueil).

    Les projets sont apparus comme insuffisamment réels dans les cas suivants :

    • « 8. la décision litigieuse en date du 16 avril 2015 indique que l'acquisition, par voie de préemption, de la parcelle située 95 et 97, avenue de Rosny, a pour objet de construire " un programme immobilier de 2 616 m² de surface plancher de l'ordre de 40 logements sociaux de qualité dans un environnement urbain attractif et d'assurer le maintien de la mixité sociale dans ce secteur de la commune ", que le projet " a pour vocation de permettre à l'OPH de Villemomble d'accroître son patrimoine et son offre sur le territoire de la Commune de Villemomble " ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, le fait que la commune de Villemomble se trouve en situation de carence au regard des objectifs définis par la loi dite " solidarité et renouvellement urbains " (SRU) en matière de logement social ne saurait permettre de justifier l'exercice du droit de préemption en l'absence de toute politique de l'habitat préalablement définie, à laquelle elle aurait été partie prenante ; que par ailleurs la convention d'utilité sociale à laquelle elle se réfère est signée uniquement entre l'office public de l'habitat de la ville de Villemomble et l'Etat ; que cette convention, qui se borne à mentionner la création de 150 nouvelles unités sur la période 2011-2016, ne comporte de surcroît aucun projet réel d'aménagement, préexistant à la décision de préemption, dans le secteur concerné ; que, dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune justifie de la réalité, à la date de la décision en litige, d'une politique locale de l'habitat qui aurait eu en particulier pour objectif de développer l'offre de logements sociaux dans le quartier où se situe l'immeuble préempté, par la création de quarante logements sociaux » (CAA Versailles, 1er mars 2018, société MJ Développement, req. n° 16VE00649) ;
    • « 4. La commune de Gennes a décidé en avril 2010 d'engager la réhabilitation du quartier dit " du Moulin " et, en vue de la construction de logements locatifs et de commerces, l'aménagement d'un ensemble de parcelles bâties, dénommé " îlot du Moulin ", dont elle est propriétaire ; que si par une délibération du 12 avril 2010, le conseil municipal de Gennes avait confié au conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) de Maine-et-Loire la mission de procéder à une étude concernant l'aménagement du quartier du Moulin et si cette étude, réalisée en décembre 2010 et intitulée " l'îlot du Grand Moulin ", incluait dans le projet la parcelle AH n° 213 pour laquelle l'avis des domaines avait été sollicité en janvier 2011, le conseil municipal, saisi de plusieurs hypothèses d'aménagement et de construction, a toutefois décidé, le 23 mai 2011, de poursuivre le projet engagé sur une emprise foncière pouvant inclure, outre les parcelles dont la commune est propriétaire, " la propriété riveraine du projet " ; qu'il ressort des schémas annexés à l'extrait des délibérations du 23 mai 2011 que cette propriété riveraine n'est pas la parcelle AH n° 213 mais une autre parcelle, située à l'extrémité opposée de l'îlot ; qu'aucune autre pièce produite par la commune, et quel que soit le nom du programme d'aménagement donné, ne permet d'établir qu'à la date de la délibération litigieuse, la commune de Gennes avait décidé d'entreprendre sur la parcelle cadastrée section AH n° 213 une action ou une opération répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme » (CAA Nantes, 27 juillet 2018, commune de Gennes, req. n° 17NT03335) ;
    • « 4. Il ressort de la décision en litige que la préemption des quatre parcelles cadastrées BZ 42, 43, 44 et 32, situées en zone UY du plan local d'urbanisme et dans la ZAC de Jalday, se réfère au projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Jean-de-Luz affirmant " sa volonté de favoriser l'accueil d'entreprises et l'installation d'emplois durables notamment par un repositionnement de l'action publique dans les secteurs de l'économie et du foncier ", ainsi qu'à " différentes délibérations ", sans autre précision de dates, " ayant pour objectifs la mise en oeuvre d'une politique publique en faveur du développement économique et notamment, d'analyser les potentialités d'aménagement de zones nouvelles dans le cadre des réflexions intercommunales conduites à l'occasion de la révision du SCOT de l'Agglomération Sud Pays Basque ", et conclut " qu'il est opportun que l'EPFL Pays Basque exerce en l'occurrence son droit de préemption afin de permettre la mise en oeuvre d'un projet permettant d'assurer une politique de développement économique conforme aux articles L.300-1 et L.210-1 du code de l'urbanisme. 5. De telles considérations, extrêmement vagues et dépourvues de toute référence à un projet, même imprécis, concrétisant les ambitions de la commune en matière d'accueil d'activités économiques, notamment industrielles, ne pouvaient suffire à justifier une décision de préemption, dont l'EPFL et la commune revendiquent au demeurant le caractère d'opposition au projet porté par la société G Immo et la société Homebox » (CAA Bordeaux, 25 octobre 2018, société G Immo, req. n° 16BX02087) ;
    • « 3. Le président de Rennes Métropole a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur les parcelles faisant l'objet de la déclaration d'intention d'aliéner au motif, selon l'arrêté contesté, que " ce bien doit être acquis afin de permettre la réalisation d'une réserve foncière pour la mise en oeuvre du projet de renouvellement urbain sur l'îlot " des Marais " situé entre le chemin des Marais, la rue Henri Queffelec et l'impasse de l'Eglise en vue de développer un programme de logements et d'activités en veillant à mettre en valeur le patrimoine bâti situé 2 chemin des Marais. Cette acquisition participera au programme de renouvellement urbain du centre-ville inscrit dans les orientations d'aménagements du Plan Local d'Urbanisme ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que si les orientations d'aménagement du plan local d'urbanisme et les documents graphiques les accompagnant, portent notamment sur le renouvellement urbain des îlots bâtis du centre-ville, dans le but notamment de diversifier les typologies de logements et de maintenir et développer le commerce, l'îlot des Marais, au sein duquel se situent les biens préemptés, ne figure pas au nombre des secteurs identifiés par les auteurs du plan local d'urbanisme. Le projet d'aménagement et de développement durable du PLU de Vern-sur-Seiche s'il énonce en particulier la nécessité d'opérations d'aménagement en renouvellement urbain afin de créer des logements, des activités et équipements, en confortant le rôle du centre, ne comporte aucune orientation propre à l'îlot des Marais. La communauté d'agglomération Rennes métropole produit également une étude urbaine et foncière portant sur l'îlot des Marais, présentée en commission d'urbanisme en juin 2014. Toutefois cette étude se borne à analyser la consistance de l'îlot, à étudier les opportunités d'acquisition et à recenser les bâtiments d'intérêt local, et ne fait état d'aucun projet d'action ou d'opération d'aménagement sur cet îlot, et en particulier sur les parcelles en litige. Rennes métropole se prévaut en outre des termes de la délibération du 14 septembre 2015, adoptée quatre semaines après la réception par la commune de la déclaration d'intention d'aliéner et trois semaines avant l'intervention de l'arrêté contesté, par laquelle le conseil municipal de Vern-sur-Seiche, après avoir constaté que " cet îlot occupe une position stratégique et sensible en coeur de ville et offre un potentiel foncier intéressant pour la création de logements et d'activités " et que " sa requalification serait par ailleurs l'occasion de repenser l'organisation des espaces publics, voiries, liaisons douces et stationnements en périphérie et notamment au droit de la place des Droits de l'Homme ", s'est borné à " s'interroger sur le devenir de cet îlot, d'autant que la vente de plusieurs biens est annoncée ", et à " engager une réflexion globale et concertée sur cet îlot stratégique du centre-ville " ainsi qu' " une étude urbaine afin de définir les conditions urbanistiques et économiques de ce renouvellement urbain en vue de la dynamisation du centre-ville » (CAA Nantes, 21 décembre 2018, CA Rennes Métropole, req. n° 17NT02706).

    Benoit Jorion