préemption

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  • Contrôle de l’institution du droit de préemption urbain renforcé

    (CAA Paris, 15 mars 2018, SDC du 72/74 rue Léon Frot, req. n° 16PA02778).

    L’article L. 213-4 du code de l’urbanisme permet aux communes d’étendre le droit de préemption à des biens qui en sont en principe préservés, tels les lots d’habitation. Il est alors question de droit de préemption urbain renforcé, ou DPUR, par opposition au droit de préemption simple (DPU). L’article L. 213-4 impose pour seule obligation que la délibération soit motivée.

    La ville de Paris, pour laquelle, pour l’essentiel, seul le droit de préemption urbain simple s’applique, a décidé, par délibération des 15, 16 et 17 décembre 2014, d’étendre le droit de préemption urbain renforcé à 257 adresses. Pour retenir ces adresses, la Ville de Paris a retenu des immeubles pouvant être considérés comme faisant partie du « parc social de fait », tel que défini par une étude de l'Atelier parisien d'urbanisme (APUR), au vu de deux critères alternatifs tenant, d'une part, à la prédominance de petits logements locatifs (immeubles privés qui regroupent plus de 70 % de logements d'une ou deux pièces et plus de 70 % de logements occupés par un locataire), et d'autre part, à la forte présence de ménages demandeurs d'un logement social (plus de 15 % des ménages inscrits au fichier des demandeurs de logement social), après avoir repéré, à partir du revenu annuel médian, les quartiers populaires où résident les ménages modestes, puis en ne retenant au sein de ces quartiers que les copropriétés situées en zone de déficit de logement social.

    Le syndicat des copropriétaires d’un des immeubles concernés a soutenu avec succès qu’il n’était pas concerné, 14 des 43 lots étant occupés par des copropriétaires, soit moins de 70 % de locataires. En conséquence, appliquant la règle posée par la ville de Paris, la Cour annule sa délibération en ce qu’elle étend le droit de préemption renforcé à l’immeuble.

    Benoît Jorion

  • Principes constitutionnels et absence de sanction pour non-respect du délai de rétrocession

    (Cons. Cons, décision 2018-707 QPC du 25 mai 2018)

    Le Conseil constitutionnel, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, a été saisi de l’article L. 142-4 du code rural relatif aux décisions de préemption prises par les SAFER et plus précisément du fait que, la loi n’a pas prévu de sanction lorsque le délai de cinq ans prévu pour la rétrocession n’était pas respecté. Ainsi que le résume le Conseil constitutionnel, « les requérants soutiennent que, faute de sanction lorsqu'il n'est pas respecté, le délai de rétrocession auquel ces dispositions conditionnent l'exercice du droit de préemption serait privé d'effectivité. Il en résulterait une méconnaissance du droit de propriété, de la liberté contractuelle et de la liberté d'entreprendre ». Une telle difficulté se pose à l’identique pour d’autres droits de préemption.

    Comme il l’avait déjà fait, le Conseil constitutionnel admet des limitations à ces droits « liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » (§ 5).

    A la question précise de l’absence de sanction en cas de dépassement du délai de cinq ans pour rétrocéder, le Conseil répond que « si le dépassement du délai prévu par les dispositions contestées n'entraîne pas la cession automatique du bien préempté à l'acquéreur évincé ou l'annulation de la préemption, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural demeure tenue à une obligation de rétrocession conforme aux finalités d'usage du droit de préemption. L'éventualité d'un détournement de la loi ou d'un abus lors de son application n'entache pas celle-ci d'inconstitutionnalité. En outre, la personne à laquelle la rétrocession tardive ou l'absence de rétrocession du bien préempté cause préjudice peut exercer une action en responsabilité dans les conditions du droit commun afin d'en obtenir réparation. Enfin, il appartient à la juridiction compétente de veiller à ce que la durée de détention du bien préempté ne conduise pas à la méconnaissance de l'objet pour lequel la loi a institué le droit de préemption » (§ 8). La réponse du Conseil est décevante. On ne sait qui est la personne à qui la violation de la règle des cinq ans pourrait causer préjudice. Ce n’est sans doute ni l’acheteur ni le vendeur, puisque c’est la décision de préemption qui a pu leur causer préjudice, et non la durée de rétention. La bonne solution, mais le Conseil constitutionnel n’a pas les moyens de l’imposer, serait de contraindre les SAFER à proposer le bien préempté à ces derniers, ou d’accepter de faire droit à leur demande de rétrocession.

    Benoît Jorion