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charvieu-chavagneux

  • Préemption et discrimination devant le juge pénal

    Cour de cassation. Chambre criminelle, 17 juin 2008, pourvoi n° 07-81666 M. Gérard X

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    Extrait : « Vu les articles 111-4 et 432-7 du code pénal ;

    Attendu que, d'une part, la loi pénale est d'interprétation stricte ;

    Attendu que, d'autre part, la discrimination prévue par l'article 432-7 du code pénal suppose, dans le premier cas visé par ce texte, le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi ;

    Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que les époux Y..., qui avaient conclu un compromis de vente en vue de l'acquisition d'un bien immobilier situé à Charvieu-Chavagneux (Isère), ont porté plainte et se sont constitués parties civiles contre Gérard X..., maire de la commune, au motif que celui-ci avait fait obstacle à la réalisation de la vente en exerçant de façon abusive le droit de préemption lui ayant été délégué en application des dispositions de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ; que Gérard X..., renvoyé devant le tribunal correctionnel sur le fondement du délit prévu par l'article 432-7 du code pénal, a été déclaré coupable de cette infraction par les premiers juges et condamné à des réparations civiles ;

    Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt énonce qu'en raison de la consonance du nom des acheteurs laissant supposer leur origine étrangère ou leur appartenance à l'islam, Gérard X..., en sa qualité de maire, a commis une discrimination en refusant aux parties civiles le droit d'acquérir la propriété d'un immeuble et de fixer librement le lieu de leur résidence ;

    Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'exercice d'un droit de préemption, fût-il abusif, ne saurait constituer le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi au sens de l'article 432-7 du code pénal, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés ;

    D'où il suit que la cassation est encourue ; »


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    Commentaire : L’arrêt rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation se rapporte à une affaire qui avait donné lieu à plusieurs articles dans la presse nationale. Un maire de l’Isère avait décidé de préempter un bien qu’un couple d’origine magrébine souhaitait acquérir. Il lui était reproché d’avoir pris cette décision précisément du fait de cette origine.

    Ce maire avait été condamné en première instance et en appel par la juridiction pénale pour s’être rendu coupable de discrimination, infraction réprimée par l’article 432-7 du code pénal.

    La Cour de cassation vient de casser l’arrêt rendu par la Cour d’appel au motif que « l'exercice d'un droit de préemption, fût-il abusif, ne saurait constituer le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi au sens de l'article 432-7 du code pénal », alors que « la discrimination prévue par l'article 432-7 du code pénal suppose le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi ».

    Ce faisant, la Cour de cassation donne une très intéressante illustration de l’interprétation stricte du droit pénal. Une préemption peut être illégale, car elle méconnaît le code de l’urbanisme. Elle peut être abusive, car, même si la distinction avec l’illégalité n’est pas toujours aisée, elle repose sur un objectif erroné. Elle n’en est pas pour autant discriminatoire. En effet, comme l’indique la Cour de cassation, l’exercice du droit de préemption n’est pas le refus d’un droit. Il n’y a en effet, ni droit à acquérir un bien déterminé, ni droit à ne pas faire l’objet d’une préemption.

    Cet arrêt illustre donc bien les limites, déjà signalées dans une précédente note (Cf. la note du 19 juillet 2007), de la notion, certes très médiatique, mais en réalité bien peu efficace, de discrimination. Une plainte pénale, contrairement à un recours devant le juge administratif, ne permet en effet pas à l’acquéreur évincé du fait d’une décision de préemption d’acquérir le bien. Cet arrêt montre qu’une telle plainte ne permet même pas de faire condamner pénalement son auteur.




    Benoît JORION
    Avocat à la Cour d’appel de Paris
    Spécialiste en droit public